La justice restaurative : "retrouver le visage de l'autre"
À la lumière de Zachée et du fils prodigue
Dans un monde largement dominé par la réponse répressive – émerge lentement un chemin vers les pratiques de justice restaurative ; Il s’agit là d’un autre chemin : celui du dialogue, de la réparation du lien et de la reconnaissance mutuelle. Cette dynamique née dans les années 1970 chez les chrétiens anabaptistes nordaméricains, ne cherche pas d’abord à punir, mais à restaurer l’humanité blessée de la victime comme de l’auteur. Elle est, selon ses mots, « le supplément d’âme de l’institution judiciaire ». Lorsque l’offense blesse l’âme, la dignité se fissure. Cette démarche est en sorte comme l’art de la réparation dorée tant apprécié par la tradition japonaise, celle du kintsugi. Non seulement cette méthode de réparation estompe les brisures mais elle redonne de l’éclat par l’emploi de liants de valeurs (or, argent..) contribuant ainsi à redonner sa valeur (et la dignité aux personnes).
Or, cette vision n’est pas nouvelle : la Bible ellemême nous en donne deux récits emblématiques – celui de Zachée (Luc 19 : 110) et celui du fils prodigue (Luc 15 : 1132).
Zachée : la justice qui répare par la restitution
Zachée, chef des collecteurs d’impôts, est un homme honni. Sa richesse vient de pratiques abusives. Mais lorsque Jésus s’invite chez lui, il découvre un regard qui ne le condamne pas : la rencontre transforme son rapport à la faute.
Il déclare : « Voici, Seigneur, je donne aux pauvres la moitié de mes biens, et si j’ai fait tort à quelqu’un, je lui rends le quadruple. » (Luc 19 : 8)
C’est là une justice restaurative avant la lettre : l’auteur reconnaît sa responsabilité, répare le préjudice et restaure le lien social. Jésus ne prononce pas de sentence ; il constate : « Le salut est entré aujourd’hui dans cette maison. » (v. 9)
Le fils prodigue : la restauration de la relation
Le fils prodigue incarne le coupable qui s’éloigne, détruit la confiance et ruine l’héritage paternel. Son retour n’est pas motivé par la peur d’une sanction, mais par le souvenir de la bonté du père. Et le père, en le voyant de loin, court vers lui : il ne réclame pas de comptes, il restaure la dignité perdue.
Cette parabole révèle la dimension spirituelle de toute justice : réparer le lien avant de réparer la faute. Ce n’est pas l’acte juridique qui sauve, mais la relation retrouvée.
Faits et chiffres 2024-2025
Le Ministère de la Justice précise que la justice restaurative, gratuite, volontaire et complémentaire de la justice pénale, peut être mise en œuvre à tous les stades de la procédure.
Selon le rapport de l’Institut français pour la justice restaurative (IFJR) et les données parlementaires :
• Au 30 juin 2024, le nombre total de participants aux mesures de justice restaurative est passé d’environ 150 fin 2023 à près de 330.
• Plus de 60 % des mesures concernaient des infractions à caractère sexuel, dont 45 % des violences hors inceste.
• Certaines régions expérimentent localement : en Isère, 16 mesures ont été menées depuis 2022, pour apaiser les victimes et prévenir la récidive.
Ces chiffres traduisent une montée en puissance lente mais réelle d’une approche qui met l’accent sur la réparation du lien plutôt que sur la seule punition.
Le mois dernier nous avions d’ailleurs mis en lumière une approche complémentaire de justice retsaurative avec le programme « SYCOMORE ».
Quand la Bible rejoint la justice restaurative contemporaine
Dans les deux récits bibliques, on retrouve trois étapes essentielles :
-> la reconnaissance du tort,
-> l’accueil bienveillant
-> et la réparation du lien.
Ces trois mouvements sont aussi ceux des démarches de médiation auteurvictime ou de rencontre condamnésvictimes.
Le but n’est pas de contourner la justice, mais d’y ajouter une dimension humaine et spirituelle :
la parole,
l’écoute
et la responsabilité.
« Aujourd’hui, le salut est entré dans cette maison »
La justice restaurative et le message de l’Évangile se rejoignent dans une même conviction : la restauration du lien précède la restauration de la loi. Zachée n’a pas été pardonné parce qu’il a remboursé ; il a remboursé parce qu’il a été pardonné. Le fils prodigue n’a pas mérité son accueil ; il l’a reçu comme une grâce.
Dans un monde qui réclame des sanctions immédiates, la justice restaurative nous apprend à prendre le temps de l’écoute, du dialogue et du pardon : c’est ce tempslà qui rend la justice véritablement humaine – et profondément digne. La justice est une sphère avec des angles et des facettes différentes où chacun nous avons un rôle à remplir.
Prions afin que cette pratique se développe que ce soit dans notre pays, nos institutions ainsi que dans nos milieux ecclésiales.
Cette démarche relève d’un encadrement spécifique car les bonnes intentions ne pourraient suffire. Le cadre et la rigueur pour un tel exercice demande beaucoup de précaution et savoir-faire.
Prions afin que de nouveaux ouvriers s’engagent dans ce travail pionnier, que des ambassadeurs de paix puissent ouvrés dans la restauration des relations brisées.
Si vous souhaitez en savoir plus, où si vous avez des questions, n’hésitez pas à nous écrire à cette adresse : contact@lacedef.org
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